The Great Ace Attorney Chronicles

The Great Ace Attorney Chronicles est composé de deux jeux d’aventure et d’enquête, des prequels de la série Phoenix Wright, que j’avais beaucoup aimé sur DS et 3DS.

L’histoire débute dans le Japon de l’ère Meiji (1868-1912), durant l’ouverture au monde extérieur et la modernisation du pays qui passe d’un système féodal à un empire moderne. Ryunosuke Naruhodo, ancêtre direct de Phoenix Wright (Ryuichi Naruhodo en VO), est un étudiant qui se retrouve à jouer malgré lui le rôle d’avocat dans l’affaire d’introduction, alors qu’il n’a aucune qualification pour ça, et est rapidement propulsé malgré lui dans ce métier dans l’Angleterre de la période victorienne. Il se retrouve bien évidemment embarqué dans des affaires de plus en plus rocambolesques et qui semblent perdues d’avance, la marque de la série.

Vous l’aurez noté : alors que les traductions des jeux Phoenix Wright ont tendance à vouloir masquer les noms des lieux pour les rendre génériques, on est ici clairement dans une période historique précise, même si le jeu prend de grandes libertés : par exemple, l’Exposition Universelle de Londres a une Crystal Tower qui n’a jamais existée, mais est inspirée à la fois par la Tour Eiffel et le Crystal Palace. Les relations entre pays sont crédibles, avec le Japon qui est forcé à l’ouverture et à la modernisation accélérée par les puissances occidentales, et les Japonais qui sont divisés sur le sujet, mais clairement c’est assez édulcoré et « politiquement correct ».

Les grandes lignes du déroulement sont identiques aux précédents épisodes : le jeu est découpé en chapitres qui tournent chacun autour d’un procès, et à l’exception du premier, on a parfois une phase de dialogues et de promenade, une phase d’enquête et de récolte d’indices et de témoignages, et une phase de procès.

Durant les phases d’enquête on va se promener dans la ville, parler avec les gens et interagir avec des éléments du décor pour essayer d’en apprendre plus sur ce qui s’est passé ; il faudra faire des allers-retours avec de nouvelles informations pour aller débloquer d’autres preuves, et chercher tant bien que mal ce qui pourra nous aider par la suite. Pas d’inquiétude cependant : il est impossible de partir au procès en ayant raté quelque chose, il faudra forcément avoir trouvé le nécessaire pour pouvoir avancer. Etant situé à la fin du XIXe / début du XXe siècle on n’a pas accès aux techniques modernes : les photos sont en noir et blanc, il n’y a pas d’analyse de sang ou de rayons X, les autopsies et la balistique sont très sommaires, et même les empreintes digitales ne sont pas encore reconnues comme des preuves. Le jeu compense ça par l’introduction de Herlock Sholmes, hommage/parodie de Sherlock Holmes vous l’aurez compris, qui invente des tas de gadgets parfois totalement anachroniques pour palier à ces manques, même si les résultats de ses analyses ne peuvent pas être acceptées lors des procès. A noter que durant ces phases, les dialogues sont vraiment très nombreux, ça parle parfois beaucoup pour pas grand-chose, mais surtout il y a de nombreux mots d’argot anglais ou écrits comme si le personnage avait un fort accent irlandais : bonne chance pour comprendre si vous ne maîtrisez pas la langue.

Les procès sont principalement composés de témoignages énoncés par des témoins, qu’il faudra « presser » pour obtenir plus de détails, ou contredire avec une preuve mise face à la bonne phrase pour mettre le témoignage en défaut, ou tirer un peu plus les vers du nez. L’objectif est de comprendre ce qui s’est réellement passé, de débusquer les mensonges et de faire la lumière sur les détails qui peuvent mettre l’accusé hors de cause, mais présenter une preuve sur la mauvaise phrase diminuera la bienveillance du juge, qui finira par couper court et déclarer l’accusé coupable après trop d’erreurs.

The Great Ace Attorney comporte deux nouveautés principales en terme de « phases de jeu ». La première, ce sont les enquêtes avec Herlock Sholmes. Parfois, lors des phases d’enquête Sholmes va faire une de ses célèbres déductions, qui sont souvent tirées par les cheveux dans les livres, et sont ici complètement à côté de la plaque. Il faudra l’aiguiller sur la bonne piste en mettant le doigt sur les détails qu’il a raté pour arriver à la véritable conclusion. La seconde nouveauté, c’est que les procès se déroulent avec un jury civil, qui peut parfaitement arriver à une conclusion avant la fin du procès : il faudra alors mettre le doigt sur les contradictions de leurs conclusions pour faire pencher la balance et reprendre les débats.

Comme dans le reste de la série, les procès semblent perdus d’avance, il faudra faire preuve de ruse et d’ingéniosité pour simplement ne pas se faire écraser dans les premières minutes, et ils ont cinquante rebondissements de situation : c’est vraiment fun. En revanche, les procès manquent clairement de recherche de motif : on considère que telle personne a tué telle autre et on se fout totalement de savoir pourquoi, même quand il n’y a aucune raison.

Comme d’habitude dans la série encore une fois, il y a régulièrement des choses qui semblent évidentes, mais que le jeu refuse. Par exemple, on me demande « qu’est-ce qui a fait du bruit » et j’ai des réponses à donner qui sont cohérentes, mais le jeu n’en veut pas : il faudra présenter la preuve spécifique. De même, il y a encore plein de moments où on voit des contradictions évidentes mais le jeu n’en veut pas non plus, surtout sur la fin du jeu : par exemple, un témoin dit quelque chose qui implique que la victime s’est faite tirer dessus par-devant alors que le rapport d’autopsie dit que c’est par-derrière, mais non, ce n’est pas considéré comme une contradiction. Résultat, on passe du temps à chercher quelle preuve colle avec quelle déclaration en essayant un peu tout et en sauvegardant/rechargeant sans arrêt.

Le second épisode est beaucoup plus complexe dès le classique procès d’introduction, dans lequel il faut faire attention à des détails qui paraissent insignifiants de premier abord. Par la suite on est moins guidé et aidé que dans le premier ; il faudra passer du temps à épuiser toutes les options de dialogues, chercher partout, présenter tout à tout le monde, etc. Il y a des moments pas évidents du tout, et parfois il faut ré-examiner un objet ou un élément de décor plusieurs fois, avant et après un dialogue ou événement, voire même cliquer sur un objet d’un décor qu’on a déjà vu cent fois et qu’on ne regarde plus, objet qui est caché par le personnage avec lequel on discute ! Autant vous dire qu’autant je n’ai pas eu besoin de lire une soluce pour le premier épisode, autant dans le second j’ai dû le faire régulièrement – c’est ça ou alors tester toutes les possibilités, ce qui est idiot et pas fun.

A noter qu’il existe également un mode « histoire » dans lequel le jeu se joue tout seul et les textes défilent sans rien faire : j’imagine que l’idée est de regarder ça comme un anime.

Techniquement c’est très propre (encore heureux pour un portage de jeu 3DS), mais si les personnages sont en 3D, ils pourraient aussi bien être en 2D tellement le jeu est statique. Cela dit il y a quand-même quelques animations amusantes, par exemple quand Naruhodo est stressé il a ses yeux qui bougent dans tous les sens, ou quand il n’est pas sûr de lui et qu’il claque des mains sur la table ça fait un petit bruit mou et il jette un coup d’œil paniqué à ses mains. Au niveau des textes, le jeu est en anglais avec des voix en anglais ou japonais, mais il y a très peu de dialogues doublés.

Ces deux épisodes de The Great Ace Attorney sont excellents, avec une histoire très prenante et pleine de rebondissements, dont le seul problème est la fin qui tourne un peu au jeu d’aventure des années 90 à tester tout et n’importe quoi. Un indispensable du genre malgré tout.

Verdict : excellent