Record of Lodoss War – Deedlit in Wonder Labyrinth

Les Chroniques de la Guerre de Lodoss est un univers imaginé à la fin des années 80 pour accompagner des sessions de jeu de rôle Donjons & Dragons de son créateur, d’abord avec une série de romans, puis un jeu de rôle dédié, puis des tas de produits annexes : des mangas, divers jeux vidéo, même une série d’histoires à la radio. Mais c’est sans doute à travers les séries d’anime de 1990 et 1998 que l’univers est le plus connu ; Deedlit in Wonder Labyrinth semble faire le lien entre l’anime de 1998 et les romans de 2019, mais je n’en suis pas sûr.

Soyons très clair dès le début sur l’inspiration du jeu : c’est une énorme repompe de Castlevania Symphony of the Night, à presque tous les niveaux : le gameplay, que ce soit de manière générale ou dans les détails avec le dash arrière ; les graphismes et les animations, par exemple avec l’animation de marche et la traînée du personnage ; le level design ; le bestiaire ; certains détails comme la notification de gain de niveau ou le marchand qu’on croise à des endroits improbables ; etc. L’autre très forte inspiration est plus étonnante : on y retrouve beaucoup de Ikaruga, avec un système de polarités/éléments opposés exploités dans les combats, mais aussi dans l’exploration.

Bien que ce ne soit pas un point important du genre, l’histoire est une grosse faiblesse du titre. En effet, elle est complètement obscure lorsqu’on n’a jamais vu la série : on va régulièrement rencontrer des PNJ que Deedlit semble déjà connaître, mais absolument rien n’est expliqué ou rappelé, pas même dans une partie « bonus » facultative. On va donc avoir le sentiment de croiser des personnages inconnus qui nous balancent des one-liners décousus avant de nous attaquer sans raison apparente. Je ne demande pas une histoire fantastique, mais comprendre un minimum ce qui se passe serait pas mal ; l’histoire de la série n’est pas non plus évoquée, et il n’y a même pas de cinématique d’introduction ! Pour un univers censé être riche, c’est assez incompréhensible : c’était une excellente opportunité d’introduire les néophytes, mais c’est tellement incohérent que ça risque plutôt de perdre même les fans assidus.

Première moitié réellement importante d’un metroidvania, le level design de Deedlit In Wonder Labyrinth est correct mais sans grande imagination, et extrêmement linéaire : c’est bien simple, chaque élément de progression débloqué (interrupteur pressé ou pouvoir acquis) n’ouvrira qu’un seul « vrai » passage, et il est donc quasiment impossible de se perdre. C’est d’autant plus flagrant que la progression est découpée en « niveaux » plutôt indépendants les uns des autres malgré leur imbrication, et que revenir dans les niveaux précédents se fait surtout à travers des portails de téléportation : le jeu aurait pu être une séquence linéaire de niveaux que l’on n’aurait pas perdu grand-chose. On pourra bien trouver quelques pièces secrètes ça et là, ainsi qu’une poignée de raccourcis, mais à part ça l’exploration se limite globalement au strict minimum, impression renforcée par la relativement courte durée de vie du jeu : je l’ai terminé avec 100% de la carte en 7h, ce qui est normal pour le genre cela dit.

Seconde moitié réellement importante, le gameplay comporte deux parties : d’un côté, il est extrêmement classique voire banal, avec les attaques, le dash arrière, les sorts, le gain d’expérience et de niveau, l’équipement à trouver ou acheter (avec des armes réellement différentes), et les capacités d’exploration déjà vues 1000 fois comme la glissade ou le double saut. Mais d’un autre côté, il y inclut un système d’éléments directement repris de Ikaruga (ou de Outland dans le même genre), mais qui est assez rare pour rester original : on a deux esprits, l’un de feu et l’autre d’eau, que l’on change d’une touche, et qui ont de multiples usages : absorber les tirs ennemis du même élément, booster la puissance de l’élément opposé, se soigner, exploiter les faiblesses des monstres, franchir certaines barrières, etc. C’est là que se trouve toute la richesse du jeu, et toute sa complexité : lorsqu’un boss nous lance un barrage de tirs qui nous oblige à changer d’élément toutes les secondes avec le bon timing ; lorsque plusieurs ennemis sensibles à des éléments opposés sont présents sur le même écran ; lorsque l’on doit traverser plusieurs barrières d’éléments opposés, etc. Il faudra également surveiller leur jauge, car une fois remplie au niveau 3 elle nous soigne automatiquement et nos frappes sont puissantes, mais le moindre coup reçu la fait grandement descendre : on devra être stratégique dans l’alternance entre l’usage d’une jauge puissante et le risque de se faire toucher, et se retrouver sans rien pour se soigner.

D’autres éléments de gameplay sont aussi intéressants, comme l’arc qui sert à résoudre quelques puzzles dans lesquels on fait ricocher les flèches, mais surtout la magie, avec des sorts rares mais puissants, et ont d’autres éléments : lumière, obscurité, poison, etc. Les ennemis ont des résistances et des faiblesses à ces éléments, mais en pratique c’est très peu exploitable car il faudrait changer de sort toutes les 5 secondes, sans parler du fait que l’affichage des faiblesses est totalement illisible, avec un système de dés absurde et des icônes minuscules et expliquées nulle part. Les boss sont de qualité très variable : les « gros », comme les dragons, sont souvent intéressants, avec des patterns à mémoriser et anticiper ; mais les humains sont souvent répétitifs, avec une alternance d’attaque à distance, charge, attaque, saut, et il suffit de les esquiver et de leur lancer plein de sorts à la tronche pour les éliminer facilement, une fois la technique comprise.

Deedlit In Wonder Labyrinth me semble avoir une difficulté plutôt bien dosée ; j’ai vu un bon nombre d’avis se plaignant de sa trop grande facilité, mais il semble qu’un patch l’ait rééquilibré par la suite car je suis mort un certain nombre de fois, aussi bien face à des boss qu’en exploration ; peut-être que les testeurs ont trop spammé la magie, qui est en effet un peu trop puissante ? Dans tous les cas, perdre n’est pas punitif : on reprend immédiatement au dernier point de sauvegarde, sans les messages « game over » de 10mn et le retour au menu insupportables des Castlevania, et il y a toujours un point de sauvegarde juste avant un boss, qui sera bien indiqué par une porte colorée : impossible de tomber sur un boss par mégarde sans s’y être préparé. La progression est plutôt rapide et fluide, mais le gain de niveau ne donne pas l’impression de réellement s’améliorer, d’autant plus que les points de vie et de magie ne s’augmentent qu’en trouvant des bonus cachés. Outre quelques boss un peu corsés, j’ai trouvé que la difficulté principale vient d’un manque de finitions dans l’exploration : les ennemis hors écran que l’on ne peut pas frapper mais qui nous tirent dessus sans problème, ceux résistants à des éléments opposés placés juste côte à côte, mais surtout de trop nombreux « sauts de la foi » où l’on tombe à l’aveugle sur des groupes d’ennemis puissants qui nous éliminent en quelques secondes, assez frustrants quand ça arrive.

Techniquement, le jeu est plutôt joli et bien animé, avec un mélange de pixel art détaillé typé PS1, et d’effets modernes 3D, bien que certaines choses soient vraiment moches, comme les animations d’explosion, et que certains combats de boss manquent un peu de lisibilité : je ne savais parfois même plus où j’étais.

Deedlit in Wonder Labyrinth serait excellent si le level design était moins linéaire ou s’il assumait un peu plus d’être linéaire, et si son histoire tenait debout. En l’état c’est plutôt bon, avec un gameplay relativement original, mais c’est loin d’être un indispensable.

Verdict : bon