MotoGP 20

MotoGP est une série de simulation de moto très sérieuse, développée par Milestone, spécialistes des jeux de course depuis 1995 avec Screamer, et surtout de moto depuis 1999 avec SuperBike, qui se trouve être le dernier jeu de moto auquel j’ai joué. Ils ont l’exclusivité de la licence MotoGP depuis 2013, et font aussi des jeux Monster Energy Supercross, MXGP, Ride, et bien d’autres encore.

La MotoGP est la « catégorie reine » des motos de compétition : des modèles qui ne servent qu’à la course, basés sur des motos existantes : c’est sans doute assez proche des GT1 ou GT2. La conduite d’une moto est extrêmement différente des voitures ; personnellement, je n’en ai jamais fait (la mobylette au collège, ça compte ?), et même si j’aime bien les jeux de course orientés simulation, autant dire que j’arrive ici comme un gros noob.

Le gameplay

MotoGP 20 est une « simulation accessible », comme Forza ou Gran Turismo : pas évident à prendre en main, mais pas non plus d’un réalisme à couper le souffle. Le plus difficile est en effet la courbe d’apprentissage lorsque l’on vient des jeux de voiture, car tout est différent : freinage, trajectoires, accélération, il faut tout ré-apprendre. Pour quelqu’un comme moi qui n’a jamais fait de moto, c’est assez difficile : on ne peut pas bourriner comme je le fais avec des voitures, et il faut avant tout anticiper les virages si on veut avoir une chance de terminer dans les 10 premiers, afin que le pilote ait le temps de se placer sur la moto pour la faire basculer, particulièrement sur les enchaînements de virages.

Les aides au pilotage sont nombreuses, et le jeu est plutôt permissif lorsque tout est activé, sans parler du rembobinage illimité, mais cela ne vous aidera pas à comprendre comment vous placer sur la piste ; apparemment, les version ultérieures ont plus d’aides et de tutoriels pour les débutants, mais je n’ai pas eu l’occasion de les essayer. Une fois les premières heures passées, et lorsque vous commencez à prendre en mains la bête, les sensations sont plutôt agréables, surtout avec les machines les plus puissantes : des monstres aux rapports poids/puissance qui enterrent la plupart des voitures de course, avec aucune marge d’erreur et des bacs à gravier qui se rapprochent à des vitesses folles ; dompter la machine devient essentiel.

A noter qu’il est possible de mettre le frein et l’accélérateur sur le stick droit, ce qui est indispensable pour faire des bons temps, car cela permet de laisser un filet de gaz sur les longues courbes. Vous risquez d’ailleurs de manquer de précision en utilisant les joycons de base, et utiliser des pads à long stick tels que les Hori Split Pad Pro ou les Binbok vous aidera grandement.

Le contenu

Au fil des années, les jeux MotoGP sont devenus extrêmement complets en contenu : celui-ci comporte la saison 2020 de MotoGP (1000cc), Moto2 (765cc), Moto3 (250cc), MotoE (électrique), Rookies Cup (250cc toutes identiques), et même quelques motos historiques 4 temps des années 2000, et des 500cc 2 temps des années 90. Cela ne remonte pas plus loin que ça : c’est dommage, j’aurais aimé rouler en pétrolette des années 70. Il n’y a évidemment pas non plus de moto de série : pour cela il faudra se tourner vers la série Ride, malheureusement pas sur Switch, mais très bonne sur consoles/PC.

Les 20 circuits reprennent également la saison 2020, ni plus ni moins, et ne sont malheureusement pas la plus grande réussite : un peu ternes et un peu vides, ils manquent cruellement de repères visuels et sont donc assez difficiles à mémoriser ; c’est peut-être la version Switch qui manque de détails. Le plus gênant, c’est le manque de version « courte » pour les catégories inférieures : les longues lignes droite ne sont pas du tout adaptées à la Moto3, qui en devient rapidement ennuyeuse. Certains circuits sont même franchement nuls : mention spéciale à celui du Qatar, avec son tracé inintéressant et ses décors totalement vides, sans aucun repère visuel. Il y a une poignée de circuits supplémentaires disponibles en mode historiques, mais ils ne sont pas sélectionnables à volonté.

Les catégories, parlons-en, d’ailleurs. Les Moto3 sont très bien pour prendre le jeu en main : pas trop rapides (« seulement » 230km/h de pointe) ni trop puissantes pour ne pas se viander en accélérant trop fort en sortie de courbe, légères, maniables et permissives, elles ont en revanche un bruit de mobylette assez insupportable. Les Moto2 demandent tout de suite beaucoup plus de finesse pour ne pas partir au tas à chaque virage, et le combat se fait autant contre la machine que contre les concurrents : c’est très intéressant, mais aussi un peu éprouvant. Comparativement, les MotoGP sont plus posées : elles ont certes plus de puissance, mais je pense que leur châssis est aussi plus adapté, elles ont plus d’adhérence, et l’ensemble est plus équilibré. Mais ce sont les 500cc 2 temps, disponibles en mode historiques, les plus brutales : elles demandent le plus de maîtrise et le plus de doigté, sans quoi on passe plus de temps la face contre le sol qu’en selle.

Outre le choix de la catégorie, la difficulté de l’IA se règle à l’aide d’un curseur, mais même au niveau le plus facile, son comportement n’est pas équilibré : elle freine extrêmement tôt et accélère lentement, mais prend les courbes rapides à fond, ce qui est la partie la plus difficile à prendre en main lorsque l’on débute. Certains circuits faits de lignes droites entrecoupées de virages secs se gagnent donc les doigts dans le nez, tandis que sur ceux composés principalement de longues courbes, on termine bon dernier tout en ayant galéré. Une fois les trajectoires comprises ce problème s’amenuise, et vous pourrez augmenter la difficulté, mais l’apprentissage se fait dans la douleur.

La carrière

MotoGP possède les classiques grand prix simple, championnat et contre la montre, ainsi qu’un mode « historique » que j’ai déjà évoqué, et un mode multijoueur (en local uniquement sur Switch), mais le gros morceau, c’est la carrière.

Ce mode carrière est très complet : on signe un contrat avec une écurie de bas de classement, on peut personnaliser sa livrée, puis on va essayer de remplir les objectifs de son contrat, qui se termine à la fin de la saison ; c’est seulement à ce moment que l’on peut changer de catégorie. Le jeu nous demande aussi de gérer les contrats et le personnel (ingénieurs, agents), et faire de la R&D pour améliorer son véhicule. C’est donc une véritable carrière, avec des gains de course à réinvestir, et pas du tout un jeu de collection comme Forza ou GT : on est plus proche d’un jeu de F1 par exemple, où on reste sur la même machine toute la saison.

Chaque grand prix se découpe en 3 sessions d’essais libres, 2 qualifications, un tour de chauffe, et la course ; tout est désactivable si on se contente de partir en dernier, mais ce serait dommage, car MotoGP a une très bonne idée : les essais ont des objectifs (temps, trajectoire), qui permettent de gagner des points de R&D pour améliorer la moto, ce qui donne un véritable intérêt à cette session. Mais attention, le jeu suit les règles officielles : vous avez un nombre limité de trains de pneus pour tout le grand prix, et si vous usez tout en essais et en qualifications, vous n’aurez plus rien à chausser une fois en course. Attention aussi à surveiller la météo : elle n’est pas dynamique et ne change pas durant la course, mais si possible, privilégiez la session de qualif qui ne se déroule pas sous la pluie.

Les motos peuvent être réglées sur beaucoup de points, mais si vous êtes comme moi, vous n’aurez aucune idée de l’impact de chacun. Heureusement, MotoGP a une autre super idée, l’aide de l’ingénieur de course : on lui dit par exemple « je ne tourne pas assez vite », et il fait un réglage pour le corriger, qui se ressent d’ailleurs assez bien et peut parfois faire gagner plusieurs secondes au tour.

Entre les essais, les qualifs et la course, une épreuve peut facilement prendre 30mn voire 1h, même avec les courses les plus courtes de 5 tours seulement. Le jeu s’adapte donc très mal à un « usage Switch », parce qu’on perd totalement ses marques si on s’arrête entre deux sessions sur un circuit ; on ne peut pas vraiment faire « juste une course vite fait » en 5mn, à moins de se limiter aux courses rapides, ce qui serait vraiment dommage. C’est sans doute un jeu plus intéressant pour les passionnés qui veulent se plonger dans la discipline, que si on veut progresser en dilettante comme on peut facilement le faire sur un Forza ou un GT ; mais si vous faites l’investissement de temps, vous en serez récompensé par une belle progression de votre pilotage.

Outre les courses rapides, il existe un mode « historique » : on choisit parmi 3 défis de difficulté variable, des courses très courtes sur un circuit aléatoire ; c’est une sorte de mode arcade. Terminer sur le podium nous donne une « monnaie » spéciale, qui permet d’acheter des pilotes historiques et motos, parmi une sélection qui tourne tous les jours, un peu en mode gacha avec des raretés, et que l’on peut ensuite utiliser en course historique libre. C’est intéressant et original, mais il est dommage que ça soit pas un peu plus fourni, notamment en terme de circuits : quelques-uns sont spécifiques à ce mode, mais trop peu.

La technique

MotoGP 20 souffre des mêmes problèmes que la plupart des portages Switch de jeux Xbox/Playstation sous Unreal Engine : c’est assez flou, il y a pas mal de popping, les textures perdent en détail, graphiquement c’est assez pauvre avec des abords de circuits vides, il n’y a aucun travail de lumière… Heureusement, ça ne gêne pas plus que ça en terme de gameplay : la fluidité est globalement au rendez-vous, à l’exception de quelques passages spécifiques sur certains circuits, qui peuvent chuter brutalement, ou quand il y a beaucoup d’adversaires à l’écran. Il y a également quelques bugs graphiques, comme des morceaux de route qui disparaissent, ou des gradins qui « scintillent » ; en revanche, les effets météo sont plutôt bien rendus, même s’ils ne sont pas au niveau de la version sur consoles de salon, bien sûr : on voit par exemple les zones plus sèches où passent les concurrents, qui donne effectivement plus d’adhérence que les zones encore trempées. Dans l’ensemble c’est assez mitigé, très jouable la plupart du temps mais rarement joli, et GRID Autosport, originaire de la génération précédente, est bien plus agréable à regarder.

Méfiez-vous cependant de ce que vous voyez : les captures officielles sur le site Nintendo proviennent clairement de la version PC, tandis que mes captures souffrent de la compression Switch qui dégrade très fortement les captures de jeux de course (idem sur GRID ou Rush Rally 3).

Pour améliorer l’immersion, plusieurs vues « internes » sont disponibles : au torse, dans la bulle, et surtout une vue casque, qui se penche au rythme du pilote, terrifiante et exaltante à la fois, et donne des sensations incroyables, à l’aide de détails sonores comme le vent ou la pluie qui augmentent de volume au fil de l’accélération. C’est malheureusement injouable lorsque l’on n’a jamais fait de moto soi-même, car on a beaucoup de mal à savoir où sont les roues par rapport à la caméra, qui bouge sans arrêt.

MotoGP est une excellente simulation de moto, et un excellent jeu de course, prenant et intéressant. Dommage qu’il soit si peu accueillant avec les nouveaux : il faudra vous investir pour en profiter vraiment.

Verdict : très bon